Notre pays connaît un déficit en logements qui nécessite, à présent, une mobilisation collective. A ce titre, les investisseurs privés doivent jouer un rôle important, notamment dans un contexte d’extrême vigilance budgétaire. L’équipe de la Ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement a ainsi posé les bases d’un nouveau dispositif fiscal visant à remplacer l’actuelle loi Scellier qui s’éteint au 1er janvier 2013.
Cette incitation fiscale, dite « dispositif Duflot », intégrée au Projet de Loi de Finances pour 2013, fait actuellement l’objet d’un examen par l’Assemblée Nationale et le Sénat.
La situation du logement sur le territoire national est pour le moins préoccupante et un chiffre en dit bien plus que tous les longs discours : les besoins sont estimés à plus de 500 000 logements par an. Un effort doit tout particulièrement être fait sur la dimension sociale avec la création chaque année de plus de 150 000 constructions à cette vocation.
Ce dispositif, présenté à l’article 57 du Projet de Loi de Finances 2013, prévoit l’insertion d’un article 199 novovicies au sein du Code Général des impôts. Ce nouveau dispositif, qui sera inclu dans le plafonnement global des niches, présente les principales caractéristiques suivantes :
• il prend la forme d’une réduction d’impôt sur le revenu (ir) de 18 % applicable aux contribuables qui acquièrent ou font construire, du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2016, des logements neufs ou assimilés qu’ils s’engagent à donner en location nue à usage d’habitation principale du locataire pendant une durée minimale de neuf ans,
• La réduction d’impôt (ri) s’applique également aux souscriptions de parts de société civile de placement immobilier (SCPi) réalisant les mêmes investissements,
• La ri est calculée, selon le cas, sur le prix de revient des logements, retenu dans la limite d’un plafond par mètre carré de surface habitable, ou sur 95 % du montant de la souscription de parts de SCPi, dans la limite d’un montant global annuel de 300 000 €,
• Les investissements ouvrant droit au bénéfice de l’avantage doivent être situés dans des zones limitées, qui présentent un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements. Toutefois, dans les zones où ces besoins sont localisés (zone B2), la réduction ne s’appliquera qu’aux logements situés dans des communes ayant fait l’objet d’un agrément du Préfet de région,
• L’avantage fiscal est réservé exclusivement aux logements respectant la réglementation thermique entrant en vigueur au 1er janvier 2013 (rT 2012) ou bénéficiant du label « BBC 2005 », pour ceux non soumis au respect de cette réglementation, ou, pour les logements rénovés, ceux justifiant d’un certain niveau de performance énergétique,
• Au titre d’une même année d’imposition, le contribuable ne peut bénéficier de la ri qu’à raison d’un seul logement, sans préjudice de la possibilité de bénéficier, au titre de la même année, de cet avantage fiscal relatif à la souscription de parts de SCPi éligibles dans la limite du plafond global de 300 000 € précité,
• Pendant toute la période couverte par l’engagement de location, les loyers ne doivent pas excéder des plafonds réglementaires qui seront fixés à un niveau intermédiaire entre le parc social et le marché libre, afin de concentrer l’effort de l’Etat sur l’offre de logement en faveur des ménages modestes. Dans cette même logique, les locataires devront satisfaire à certaines conditions de ressources,
• Cette préoccupation s’accompagne de la recherche d’une mixité sociale et de protection de l’investisseur qui passera par la forme d’une limitation du nombre de logements pouvant être éligibles à la ri au sein d’un même immeuble. Cette limitation sera d’ailleurs sanctionnée par une amende à la charge des promoteurs cédant une proportion excessive de logements en vue d’un usage locatif ouvrant droit à l’avantage fiscal,
• Enfin, afin d’adapter au mieux l’offre locative aux caractéristiques locales et de garantir que le bénéfice de l’avantage fiscal s’accompagne du respect de plafonds de loyer véritablement intermédiaires, le Préfet de région pourra, sur avis du comité régional de l’habitat, minorer les plafonds de loyers,
• Le dispositif fera l’objet d’une évaluation préalable au dépôt du Projet de Loi de Finances pour 2015 qui déterminera les conditions de son évolution.
Le diagnostic à l’origine de la mise en place du dispositif Duflot ne fait aucun doute, notre pays souffre effectivement d’un important déficit en logements sociaux. il convient de parvenir à une mobilisation de grande envergure sur ce sujet.
Concernant les moyens pour y parvenir, le mécanisme du dispositif présenté laisse plus dubitatif.
Tout d’abord concernant la « cible investisseurs ». Le dispositif, en raison de son mécanisme et du plafonnement global des niches fiscales à 10 000 euros, s’adresse en priorité aux classes moyennes. Ces dernières, rappelons-le, sont en période de crise, sujettes à des anticipations économiques particulièrement négatives. Leur mobilisation peut ainsi, dans le contexte actuel, se révéler aléatoire tant les incertitudes au plan individuel sont nombreuses et les marges de manœuvre financières réduites pour cette frange de la population. Par ailleurs, la pratique montre qu’un « profil locataire » à forte dimension sociale est souvent à l’origine d’inquiétudes pour cette catégorie d’investisseurs, qui y voit notamment une source d’impayés et un potentiel réduit de valorisation de leurs biens.
Ensuite, les rendements n’offrent qu’une bien maigre consolation. obtenir des rendements satisfaisants avec les niveaux de loyers annoncés (- 20 % par rapport aux pratiques de marché), c’est parier sur la baisse des prix immobiliers. or, il semble que nous nous acheminions vers un scénario bien différent. La modification de la loi SrU pour atteindre 25 % de logements sociaux par commune va en effet immanquablement impliquer une hausse des prix du secteur libre. or, cette tendance peut, au mieux, être compensée par un marché plus atone pour in fine, constater une stagnation des prix immobiliers aux niveaux élevés que nous connaissons aujourd’hui. Prix constants et loyers minorés de 20 %, la conclusion est sans appel, des rendements dégradés de 20 % ! Et la faiblesse de ces rendements n’est pas compensée par la prime fiscale proposée aux investisseurs.
Un bref comparatif avec le dispositif Scellier intermédiaire vaut mieux que tous les longs discours :
Soit deux investissements sur 15 ans réalisés en Scellier intermédiaire et Duflot offrant des rendements bruts de 3,5 % d’une part et de 2,8 % ( 3,5 % x (1 - 20 %) ) d’autre part.
Sur 15 ans, la loi Scellier intermédiaire affiche un différentiel de rendement de 13,5 % par rapport au dispositif Duflot. rappelons à titre informatif qu’en dépit de cette comparaison flatteuse, la loi Scellier intermédiaire peine aujourd’hui à trouver son public, comme en témoigne le niveau actuel des ventes.
En conclusion, entre une cible investisseurs largement impactée par la crise, une coloration sociale forte, des performances financières en berne et une prime fiscale limitée, on peut d’ores et déjà s’interroger sur le succès du dispositif Duflot.
Par Christine ROQUIER, Chargée de Missions - CERENICIMO
Source : CERINEWS Nov-Déc 2012
Remerciements : CERENICIMO
Publié le 23/11/2012
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