Une explication sur l'avenir de l'assurance-vie face à la dette souveraine. Illustré par un extrait de l'emission "C dans l'Air" du 26 avril 2012 ayant pour titre "La crise au centre".
Yves Calvi
Journaliste et présentateur
Guillaume Roquette
Directeur de la rédaction de l'hebdomadaire Valeurs actuelles.
Nicolas Bouzou
Economiste.
Marc Fiorentino
Président fondateur d’une société de bourse et éditorialiste sur la radio BFM, au
journal La Tribune et au magazine Challenges.
Bernard Maris
Economiste, membre du conseil général de la Banque de France.
Marc Fiorentino : « Mais Il faut couper dans le vif. Une entreprise… ramenons çà juste quelques secondes à une entreprise. Une entreprise aujourd’hui, une entreprise qui a des recettes qui stagnent ou qui sont en diminution, d’accord ? Et qui a des dépenses qui sont supérieures à ses recettes donc qui est dans une situation de difficulté. Elle peut réduire ce déséquilibre et revenir à un équilibre. Mais si en plus elle a une dette qui est trop importante, elle ne peut pas sortir de cette crise là. Et il y a quelque chose qui s’appelle en matière de gestion de l’entreprise : le redressement judiciaire. C'est-à-dire qu’on va au tribunal et on dit « je suis désolé je vais réduire mes dépenses c'est-à-dire, c’est ce qu’on fait, c’est l’austérité… »
Yves Calvi : « C’est qui le tribunal dans ce cas là ? Moi je raisonne avec vous d’accord, c’est quoi ? »
Marc Fiorentino : « Le tribunal, c’est un tribunal mondial parce que tous nos intérêts…L’avantage de la globalisation, l’avantage il faut qu’il y ait beaucoup d’avantages dans la globalisation. Là l’avantage, c’est que nos sorts sont liés. C’est à dire que si demain, on va voir nos créanciers et comme Nicolas (Bouzou) l’a dit tout à l’heure très justement, c'est-à-dire les japonais, c'est-à-dire les chinois, les pays du Golfe, les pays émergents, ils vont avoir tout intérêt à prendre une perte peut-être de 20%, de 30% immédiate parce qu’on leur dira on vous doit 100 on vous remboursera que 70 pour garder le client. C'est-à-dire pour pouvoir continuer à commercer avec nous. Demain si les Etats Unis vont voir la Chine en leur disant « écoutez, on a trop de dettes et on ne ressortira pas de notre problématique de croissance, il faut que vous acceptiez qu’on réduise une partie de notre dette », la Chine acceptera parce que la Chine veut continuer à vendre des produits aux Etats Unis. Si on n’a pas de croissance, on l’a vu la croissance en Chine, elle a baissé, elle a baissé pourquoi ? parce que la croissance en Europe a baissé. »
Yves Calvi : « Et on ne risque pas une fracture de l’économie mondiale ? »
Marc Fiorentino : « On est dans une fracture. Une fois pour toute, essayons de comprendre. Malgré tout ce qui a été dit et les discours d’espoir, qu’on est dans la crise économique la plus grave depuis les années 30. On est dans une crise dramatique. »
Yves Calvi : « Et les chinois, ils ne vont pas nous répondre «bon, écoutez, nous on se démerde avec les Quataris et les pays du Golfe parce que vos histoires, çà ne nous intéressent plus ? »
Marc Fiorentino : « Ce n’est pas possible. C’est ce qu’on nous a faire croire. Moi on m’a raconté depuis 3 ans qu’il y avait l’histoire du découplage. C'est-à-dire que les pays émergents pouvaient vivre tout seul sans la croissance de l’Europe et des Etats-Unis. On s’aperçoit que la croissance chinoise elle va dans le mur parce que la croissance européenne elle va dans le mur, c’est quand même surprenant – on nous a dit : « les chinois maintenant, il y a une population moyenne, les classes moyennes qui commencent à consommer, c’est plus des exportateurs, ils n’ont plus besoin de nous vendre des teeshirts. On s’aperçoit que quand ils ne nous vendent plus de teeshirt ils ont quand même un problème très grave de croissance. Je crois qu’il faut à un moment donné faire deux constatations : une, là je ne suis pas du tout d’accord, la situation est grave. Ce n’est jamais agréable d’annoncer les mauvaises nouvelles, elle est très grave. L’autre, c’est que l’équation est impossible à résoudre. L’équation austérité, croissance, dépense publique et rêve, elle est impossible à résoudre sauf, sauf si on réduit la dette.
Yves Calvi : « Alors, Guillaume Roquette. »
Guillaume Roquette : « Pardon je ne suis pas là pour poser les questions, à chacun son travail mais moi j’en ai quand même une. Est-ce que, y aura simplement les quataris, les chinois et les japonais qui vont devoir se prendre 30% de paume ? A ce moment là, ce n’est pas tragique. Enfin on est désolé pour eux mais ce n’est pas très important. Mais la dette française elle est aussi détenue à 30 % par les français. Ca veut dire que les épargnants français qui ont de l’assurance-vie avec des fonds en euros et de la dette publique espagnole ou française eux aussi, ils vont perdre 20 à 30 % de leur épargne.
Marc Fiorentino : « Je vais vous répondre quelque chose de très simple. Quand vous êtes actionnaire et que le CAC perd 20%. Et bien vous avez perdu 20%. Pourquoi y aurait-il un traitement différencié entre des gens qui ont pris le risque de prêter à l’état français, à l’état espagnol, à l’état italien ?
Guillaume Roquette : « Parce que jusqu’à présent on nous avait dit que c’était sans risque. C’est ce que nous disent nos banquiers en tout cas. »
Yves Calvi : « Je vous signale que tous ceux qui vous écoutent ce soir ils retirent leur assurance-vie des banques. Mais bien si bien entendu. »
Bernard Maris : « Je suis entièrement d’accord avec lui. C’est quelque chose que j’ai dit et je l’ai déjà dit devant Nicolas (Bouzou) assez souvent c'est-à-dire qu’on ne pourrait pas rembourser. Et qu’un pays comme l’Espagne ne pourra pas rembourser l’Italie, ne pourra pas non plus rembourser. C'est-à-dire qu’il faut arriver à une renégociation de toutes les dettes pas uniquement la dette.. »
Yves Calvi : « Globales ? »
Bernard Maris : « Mais évidemment. C’est çà le nouveau. On est au terme de deux pactes. Le pacte français arrive à son terme. On le voit avec l’émergence du Front National. Il arrive à son terme le pacte social français. Il arrive à son terme et le pacte européen aussi arrive à son terme. »
Yves Calvi : « Est-ce qu’on peut plonger de 20% ? Est-ce qu’on peut étaler sur 50 ans ? Moi j’en sais rien… c’est bien je serai mort. »
Bernard Maris : « Il faut renégocier. On est encore au moment où on peut renégocier la dette publique de façon assez mineure c'est-à-dire qu’on ne va pas perdre 70%. Il a raison Marc Fiorentino on va perdre 20, 25 % quelque chose comme çà. Il faut l’accepter si on ne veut pas tuer l’économie et à ce moment là ce sera un moyen…on n’a plus le souffle de la dévaluation monétaire pour le faire. Ce sera un moyen de faire repartir l’économie. »
Yves Calvi : « J’insiste, vous êtes quand même entrain de théoriser l’un et l’autre.. »
Marc Fiorentino : « Mais c’est faux… »
Yves Calvi : « Je peux terminer ? Que en gros, ceux qui nous écoutent ce soir et finalement mais çà concerne tout le monde, nos partenaires européens et une partie, il faut quelque part on ampute tout ce qu’on a de 25% à un moment ou un autre et puis que voilà c’est comme ca qu’on va s’en sortir. Moi je suis désolé, je traduis ce que je comprends. »
Yves Calvi : « C’est bien ce que vous nous dites ? »
Marc Fiorentino : « Non. C’est juste par rapport à ce que vous décriviez tout à l’heure. »
Yves Calvi : « je pensais que j’avais ceux qui pensaient qui avaient un appartement qui valaient 100 000 €, il en vaut 75 000 !!! Vous faîtes pas d’illusion. Et toute façon çà ne vaudra pas plus. Ceux qui n’ont rien vous n’aurez pas beaucoup plus mais en tout cas attendez-vous quand même à mettre un tout petit peu moins de beurre dans les épinards et voire un peu de margarine allégée. Enfin voila, je vous ai bien compris ? »
Marc Fiorentino : « Y a un moment où il faut faire un choix. C'est-à-dire qu’il y a un moment où il y a un sacrifice à faire : est-ce qu’on rentre dans 5 ans de croissance zéro, d’austérité, de hausse du chômage, d’équations qui sont impossibles à résoudre ou est-ce qu’on accepte un sacrifice ? »
Yves Calvi : « Je comprends mieux immobiliez-vous.. »
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Publié le 21/05/2012
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